Évolution du Web

Le Web supporte trois courants dans sa construction. Il y a d’abord eu le web documentaire dont la principale fonction a été de mettre à disposition des internautes des informations sur des pages web. Elles sont reliées par des liens hypertextes, toujours fondamentaux pour faire du Web. Arrive plus tard le web de plateforme, aujourd’hui largement dominant. Il s’agit de proposer des services de publication, stockage et communication aux utilisateurs. Le dernier est le web de données, caché, plus complexe, qui permet l’échanges de données entre des services et des appareils toujours plus nombreux.

C’est ce dernier courant qui monétise aujourd’hui le Web dont la plupart des services sont gratuits. Les entreprises mettant à disposition ces plateformes génèrent à partir de notre utilisation des données qui viennent s’ajouter aux différentes récoltes par des robots. Le tout est massivement traité, analysé, vendu pour engranger de nouveaux services payants. La donnée, et donc le web de données, est une face cachée mais dont l’impact est très fort. L’utilisateur n’est plus simplement le lecteur d’une page web statique mais il contribue au contenu de la plateforme dynamique, laquelle enrichit systématiquement ce contenu pour le monétiser.

Du contenu au flux

Les métiers du Web glissent à mesure que les utilisateurs gagnent en autonomie et que les services facilitent la création de contenus. Il n’y a plus de webmaster désormais ; tout le monde peut créer un site web en quelques clics, sans l’aide d’un professionnel. Les moteurs de recherches sont optimisés pour retrouver les contenus, sans intervention d’un expert en référencement. Les générateurs prennent en charge l’enregistrement des métadonnées ; ils structurent automatiquement le contenu pour qu’il puisse être analysé lorsqu’il est partagé. Le Web est automatisé, ne nécessite que peu l’intervention de spécialistes pour des projets autonomes. C’est la mise en réseau des contenus qui pose question désormais. Ainsi, les métiers du Web sont de moins en moins concentrés sur la création de pages web, mais plutôt l’architecture de nouvelles solutions de publication, de capture des données et d’analyse.

Nous parlons de démarches d’agrégation (de flux, de programmes) de l’existant plutôt que de création ex nihilo. On travaille désormais sur des plateformes, des bases de données tandis que les outils pour générer le site sont déjà bien nombreux et permettent de relayer ce travail préalable.

Les trois courants du Web tels que nous les avons cités ne sont à aucun moment remplacés ou figés. Mieux, ils communiquent. Le web documentaire évolue encore grâce à de nouvelles représentations suivant l’évolution des navigateurs web. Ils sont désormais capables d’afficher des pages dynamiques, complexes, lourdes avec des diagrammes et autres représentations interactives suivant la tendance du web de données. Le web de plateforme évolue également, de plus en plus orienté vers le multimédia et particulièrement la vidéo. Suivant cette tendance, de plus en plus de logiciels permettent d’analyser ces contenus pour en extraire des données. Le meilleur exemple de cette évolution est WikiData. Ce site propose avec différents outils comme OpenRefine d’enrichir des données à partir des informations saisie dans l’encyclopédie universelle. Le web documentaire devient web de données.

Fracture numérique

La fracture numérique a plusieurs niveaux. L’incapacité pour une partie de la population mondiale à comprendre les outils numériques, et notamment le Web actuel, est un problème majeur et à différents degrés. Quand bien même un utilisateur arriverait à accéder à une machine pour se connecter au Web ; à pouvoir utiliser son interface et de manière efficace ; à définir l’information qu’il cherche ; à trouver cette information avec ses accès et connaissances ; à naviguer au sein de la plateforme ; à filtrer l’information ; à réutiliser cette information, il se peut qu’il ne puisse saisir l’importance et la nature des données qu’il a généré durant son utilisation. Pourtant cet aspect est fondamental pour la protection individuelle, bien qu’il vienne après de lourdes premières questions d’accessibilité, de maîtrise technique et de littératie.

La littératie est la capacité d’une personne à définir une information recherchée et à la trouver en ayant su franchir de nombreuses barrières. Les limitations physiques et cognitives sont premières, suivies d’une formation au filtrage, à la vérification et au recoupement de l’information. Si la publication est aujourd’hui largement facilitée, l’enjeu actuel est dans l’accès et la navigation entre les innombrables contenus. Il s’agit de former les internautes à utiliser le Web, à le questionner avec des requêtes ; de former les développeurs et designers à l’accessibilité numérique et au respect de la vie privée ; de former les analystes au traitement massif des données, à leur extraction.